Notes de l’auteur.
Cette jungle est aussi terrible que celle de Bornéo. Zone rarement franchie.
Quatre français réalisent l’exploit à la dernière guerre. Partis du côté colombien, ils se frayent un chemin à la machette pour rejoindre Panama et de là, de Gaulle. Deux y ont laissé leurs os.
Un autre, également, réussit à vaincre l’implacable Darien. Un colombien, le capitaine Ospinanayos qui, passant par l’état du Choco, est parvenu en pirogue à relier le Pacifique à la Mer CaraÏbe à travers des rios et leurs affluents.
Avant lui les pirates du 16ème siècle avaient découvert le passage reliant les deux mers : ils faisaient tracter sur des rios leurs Caravelles par des pirogues équipées de rudes rameurs à travers la jungle farouche, allant d’une mer à l’autre dans les deux sens. Ce passage n’a pas été retrouvé depuis. Le capitaine Ospinanayos n’a certainement pas dû emprunter le même avec son étroite embarcation.
La Transamerica – Partant de l’Argentine-Brésil-Chili-Pérou par la Transamazonienne (qui rejoindra par connexion la Transamerica).
Cette route fabuleuse qui part de la Colombie ensuite-Panama et l’Amérique Centrale et les USA s’achèvera au Canada. Elle devrait apporter une aide économique au Sud-Amérique. La Colombie elle, son projet avance : Bogota-Medellin et le terrible Darien, puis Panama.
PANAMA
Panama à Chepo route valable. Ensuite vers El Llano, Canita, route empierrée. Il faut jeep ou camion…
Route de Chepo à Puerto Coquiro qui donne sur le Rio Bayano. Barques, pirogues creusées dans des troncs d’arbres, large place avant. Sur la droite la selva. Gauche les habitations de pêcheurs. Vieux ridé, malin, lunettes, casquette rouge u.s… Sa femme, jolie, noire, rieuse.
San Isidro. Les rives sont la forêt vierge. Parfois un cabri, un cheval… oiseaux, rapaces, merles marrons, pélicans… À une heure du Rio, large de 1000 2000 mètres, une tribu indienne pueblo.
Prénom de la petite indienne Nilka. Sa tribu est Veraguano, venue du nord de Panama. Mère et grand-mère adorables. Je donne un dollar pour l’enfant. La mère, quand nous revenons à la pirogue me tend 3 oranges, 1 pour chacun de nous.
PUERTO COQUIRO
SUR LE RIO BAYANO
Le rio Bayano est rapide, coudé, souvent troncs d’arbres dangereux. Beaucoup d’oiseaux sur ces branches, figés, immobiles, curieux dans le décor.
A San Isidro, beaucoup de chevaux maigres, efflanqués, petits, ceux du Sud-Amérique, mais résistants. Nulle route n’y vient. Seuls les chevaux et le Rio pour s’y rendre. Sorte de bâtisse sur pilotis formant office d’église. Le père à dix heures doit dire la messe. Il vient pour, exprès.
Après Canita on roule, route qui se rétrécie. La selva autour. Parfois la route s’enfonce tel un coin entre 2 pans des Andes, comme découpée à la scie. Terre rougeâtre rappelant l’Amazonie, Brasilia, Belo Horizonte.
Avant le pont qui coupe l’extraordinaire lac Bayano, on tombe sur des Indiens Kuna. Paillottes. Toits faits de feuilles de palmiers séchées. Race ne se mélangeant pas. Parlant peu. Refusant photos. Décor superbe, vu du pont en métal pas encore peint. Rudimentaire. Là s’arrêtent les fils électriques et poteaux.
LES INDIENS KUNA
LE TERRIBLE DARIEN
Au-delà commence le terrible Darien, quasi inviolé, qui donne sur la Colombie, elle aussi inviolée de ce côté. De Canita à Canazas 80 km environ de route impossible. Route pas mauvaise de Canazas à Santa Fé. Là un poste de guardia nationale. Hommes efficaces en kaki, couvrant le territoire.
Route vers Meteti, puis à 15km de là, route dans la jungle, bonne mais en pleine brousse. Terre jaune, pluies tropicales, boues. Sûrement impraticable. Ensuite sur Meteti, 50 km en pire. Puis de là sur Yaviza, quasi l’inconnu. Route en pointillé sur la carte.
Yaviza. Des millénaires bouleversés, taillés au bulldozer. Rudement. Monstrueux troncs d’arbres abattus par la foudre. Terrains défoncés au bulldozer, montagne de terre de chaque côté avec végétaux pourrissants, formés depuis des siècles. Travail titanesque, bien fait. Equipes de noirs et panaméens, indiens.
Carbets dans la jungle, très rudimentaires, suivent l’avance des broussards. Sans pilotis. Manger et dormir très succins. Impression de viol des siècles. Luxuriance de la végétation. Lianes, arbres de toutes tailles, enchevêtrés, de toutes couleurs.
Là, il y a peu, les fauves étaient rois. Ils ne reviennent qu’à la nuit pour boire dans des sortes de pièces d’eau boueuse qui longent l’éclatement causé par les bulldozers. Ceux-ci de teinte rouge brique semblent colossaux, insolites dans ce coin perdu du monde … et pourtant, les hommes gagneront.
Au détriment de la beauté, du silence, de la pureté de l’air. Ainsi que toujours. Et les fauves une fois encore vont reculer devant le bruit et la fureur, la démolition. À Yaviza stoppe la ruée. Pour le moment. Là le décor est réellement impressionnant, fabuleux, gigantesque.
Les rares ouvriers et ces machines dressées dans cette demi-pénombre de la selva… là où depuis 1000 ans, nul n’était venu… Étais jusque-là le vendredi 27 janvier 1984. Toutes les routes menant à ces travaux sont, comme à Chepo et à Canita, verrouillées par services guardias nationales ou policiers.
Leur poste est signalé sur la route par 1 panneau : ALTO. Ils font signe ou non de passer. Pour le roman, on peut présumer que prévenus ils établiraient des barrages.
YAVIZA, La ROUTE PAN AMERICA EN CONSTRUCTION
Retour vers panama. Mer Caraîbe Puerto Obaldia. Plus haut, à la hauteur du lac Bayano sur la Mer Caraîbe : Playon Chico.
RODÉO SUR LA ROUTE DU RETOUR
« BONTEMPS ET LES INDIENS »
Extrait – A. le Breton – 1984 – Presses de la cité.
« Le Veraguano lâcha la bride et donna légèrement du talon contre le flan de Matcho, son coursier. La bête empruntera d’elle-même le petit chemin qui menait aux carbets des Veraguanos…
De la fuente de sodas, ainsi s’appelaient ici les tiendas, ces petites baraques échelonnées sur les routes du Sud-Amérique où on trouve mille bricoles : cigarettes, Pepsi-cola, bière, galettes, souliers, couteaux, sombreros, machette, ficelle… sa femme Nikla lui fit un signe amical. »